Ecosse-France 1921 : le soleil d’Inverleith

EN 1921, ON ELISAIT ARISTIDE BRIAND A LA PRESIDENCE DU CONSEIL, ON CONDAMNAIT LANDRU A LA PEINE CAPITALE, ON PUBLIAIT UN CODE DE LA ROUTE… ET LA FRANCE S’EN ALLAIT FAIRE TOMBER LA FORTERESSE ECOSSAISE D’INVERLEITH.

Le vendredi après-midi, peu après son arrivée à Inverleith, le journaliste de L’Auto vient inspecter le terrain où doit avoir lieu le lendemain le premier Ecosse-France de l’Après-Guerre en ouverture du Tournoi. Immédiatement, l’endroit et les conditions atmosphériques lui rappellent que la dernière visite des Français s’était soldée en 1912 par une belle déroute (3-31). Il écrit : « Ce ground, situé sur un plateau et si durement exposé à tous les vents d’Ecosse, son décor prodigieux et ce ciel gris… et comme rugueux, ce vent qui soufflait en tempête, oui tout cela recréa de façon singulièrement précise l’atmonsphère de notre déroute de 1912. »

« Tout cela recréa de façon singulièrement précise l’atmonsphère de notre déroute de 1912 »

En 1921, l’Ecosse reste une place forte du rugby. N’a-t-elle pas remporté l’édition précédente en compagnie de l’Angleterre et du Pays de Galles. Mais en 1921, la France n’est plus le nain rugbystique qu’elle était avant la Guerre. N’a-t-elle pas remporté l’année précédente sa première victoire en terre étrangère (Irlande 15-6) ? Son jeu progresse, c’est incontestable. La fin de la guerre a permis de structurer une équipe et un jeu autour d’un noyaux de militaires à Joinville qui allait constituer l’ossature du XV de France au début des années 1920.

L’équipe qui se présente en Ecosse est pourtant bienb chamboulée par rapport à celle qui a joué en octobre 1920 contre les Etats-Unis (14-5). On enregistre pas moins de 8 changements dans le XV de départ. Le XV de France devra surtout se passer de joueurs de la trempe de Jauréguy, Sebedio ou Cassyet-Armagnac. Mais avec Lubin-Lebrère, Borde ou Crabos, il a d’autres atouts à faire valoir. Et, miracle, au matin du match, la tempète de la veille s’est apaisée. Le ciel est bleu et on n’enregistre plus que des vents à 10km/h.

La France profite de ces conditions pour prendre le match par le bon bout. L’entame est d’ailleurs leur avantage comme le relate l’envoyé spécial de L’Auto : « La balle vole de main en mai, de Crabos à Borde, de Borde à Lobiès. Et tout cela avec un perçant, une rapidité, une vitesse décisifs. » Puis les avants écossais reprennent le contrôle du ballon mais butent sur une défense français efficace.

« Les arrières français sont une révélation pour nous. Les nôtres en comparaison sont des chevaux de fiacre à côté de chevaux de course »

La décision va se faire après le repos. C’est Billac qui signe l’exploit en conclusion  d’un beau mouvement des trois-quarts, impulsé par Crabos qui récupérait un ballon tombé pour le transmettre à Borde qui envoyait l’ouvreur bayonnais dans l’en-but. Mais la fin de match allait être difficile pour ne pas dire douloureuse pour les Français. Devant, il n’y avait plus que six joueurs valides. Mais même à six, il était dit que les Ecossais ne passeraient pas et que la France s’imposerait pour la première fois de son histoire en Ecosse.

Les Ecossais, beaux joueurs, reconnurent la supériorité de leurs hôtes du jour lors du banquet d’après-match, regrettant, déjà, leur faible réservoir de joueurs au regard de celui des Français : « Le jour n’est pas loin où nous ne pourrons plus lutter à armes égales contre la formidable sélection qui sortira du lot de vos 50.000 rugbymen » déclarait leur représentant. Mais c’est avant tout par leur jeu de trois-quarts que les Français avaient fait sensation ce jour-là. Pas peu fier, le reporter L’Auto raconte d’ailleurs cette anecdote entendu dans ls travées du stade d’Inverleith : « Les arrières français sont une révélation pour nous. Les nôtres en comparaison sont des chevaux de fiacre à côté de chevaux de course. » Ainsi parlait le viel Ecossais assis à mes côtés. »

Les héros d’Inverleith furent reçus comme il se doit à leur retour en France. A Calais, une délégation locale vint les accueillir. A Paris, malgré une bonne heure de retard à leur arrivée en Gare du Nord, ce sont 3.000 personnes qui les attendaient. « Les joueurs furent littéralement happés par la foule, raconte le journalste de « L’Auto », et Crabos, le capitaine de l’équipe de France, fut porté en triomphe. On réclama également Billac qui avait marqué l’essai vainqueur mais le petit Bayonnais s’était esquivé pour se dérober aux obligations. »

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